Echange or jaune contre or noir, svp! (19/03/13)
Salut à tous et à toutes!!
Il est minuit passé alors que je démarre la rédaction de ce nouvel article, et bien que je sois particulièrement éreinté par le travail - de temps en temps, faut-il bien s'y plier - et par le manque de sommeil, je ne peux résister à l'envie de vous raconter une anecdote. Un petit bout de tranche de vie, la mienne en l'occurrence, servie ou non avec du Nutella, un coulis de framboise ou un bon verre de vin, selon vos préférences.
L'événement a eu lieu ce dimanche, 18ème jour du mois de mars. Il doit être environ 15 heures, ou peut être plus, quand je prend la route depuis le domicile d'un couple d'amis, aux environs de Nîmes. La nuit a été longue, réunion festive oblige, et mes yeux sont tout juste affutés à la conduite. Mon cerveau a eu le temps d'émerger depuis le réveil et je tiens le volant avec flegme et sérénité. Je ne suis pas vraiment pressé alors autant rouler avec souplesse. J'écoute vaguement la radio et, ce faisant, je compte les kilomètres jusqu'à chez moi. Un trajet que je connais bien: passer Codognan, prendre l'autoroute et filer direction Montpellier, puis prendre la sortie n°28 - Hôpitaux et Facultés, tourner à droite, au rond-point prendre tout droit, puis... Et puis, voir un homme sur le bas-côté, posté debout devant une voiture et gesticulant ses bras avec espoir. Tiens, voilà qui n'était pas prévu! Je met clignotant et m'arrête quelques mètres après lui. Ainsi, alors que j'ouvre difficilement la vitre du côté passager - ma Punto n'est pas dotée de toutes les options habituelles -, l'homme se penche et m'explique dans un français approximatif qu'il est en panne d'essence, que sa carte bancaire est cassée et qu'il se sent bien embêté pour rejoindre Barcelone. Comme je le comprend! Je regarde son véhicule, une Golf immatriculée au Danemark. Lui, n'a a priori ni l'air ni l'accent danois, bien que je ne sois pas expert en pays nordiques. Il m'apparait plutôt, dans l'instant et sans aucune explication objective à donner, roumain ou gitan. En tout cas pas danois. Mais après tout, pourquoi pas? Il me semble sincère, en difficulté, et j'ai envie de l'aider.
C'est la raison pour laquelle, lorsqu'il me demande de le conduire à une pompe à essence et de remplir un tant soit peu son bidon, j'accepte. Il va même jusqu'à me proposer une bague qu'il ôte alors de l'annulaire de sa main droite, et qu'il me tend en guise de remerciement. "300 euros à revendre, moi non, pas papier français!" me dit-il. Je refuse. D'abord, parce que je n'ai aucune idée de la réelle valeur de cette bague. Ensuite, parce qu'elle peut avoir une valeur plus sentimentale que monétaire. Et enfin, surtout, parce que je me méfie des cadeaux que m'offrent les inconnus. (Oui oui, l'injonction parentale comprend tout autant les bonbons que les bagues, chers lecteurs). Il n'insiste pas trop et monte dans ma voiture. Les suspensions s'affaissent légèrement car le gaillard doit facilement mesurer 1m85 pour 90 kilos. Plus costaud que moi donc! Pendant le petit kilomètre qui nous sépare de la station d'essence la plus proche, il réitère sa proposition concernant la bague, et rajoute même une chaîne si je lui donne de l'argent. Tout cela commence à me sembler de plus en plus bizarre et je refuse à nouveau. Je lui propose un autre arrangement. En échange du service que je lui rend, je lui demande de s'en souvenir lorsqu'un jour son tour viendra d'aider quelqu'un. Mais il me donne l'impression de ne pas comprendre... Moi qui m'imaginais déjà mettre en action le doux rêve de Trevor McKinney, dans Un Monde Meilleur, je me met plutôt le doigt dans l'oeil. Nous arrivons et je met 10 litres d'essence dans son bidon, pour la somme de 15 euros et des poussières, effort déjà substantiel à mon échelle me semble-t-il. Sur le retour, il insiste encore pour me vendre ses bijoux contre de l'argent, arguant de ses difficultés dans un français toujours aussi approximatif. Et si c'était vrai? Et si leur revente me rapportait bien plus que les 50, 100 ou 300 euros qu'il me demandait? Je regarde la bague et la chaîne, elles sont en or - ou pas! - et je vois des poinçons sur chacune d'elles. Et si...? J'hésite encore un peu et je prend finalement une décision. "Non, je ne peux pas prendre le risque de me faire entuber", me dis-je. Il est déçu, de toute évidence. Mais je n'y vois pas la déception de l'escroc qui n'aurait pas réussi son coup. Plutôt la déception d'un homme à qui la vie n'a pas dit "Tiens, et reprends-en, fais toi plaisir", à moins que l'objet proposé ne soit la galère. Une touche de culpabilité? Certainement! Du regret? Egalement. Celui de ne pas avoir pu donné plus, faute de moyens et de crédit de confiance à lui allouer. Mais aussi de la fierté, celle d'avoir fait quelque chose, de m'être arrêté et d'avoir donné un peu, fut-il pas grand chose à l'égard de ce dont il avait besoin.
Je l'ai déposé à sa voiture, dans laquelle un autre homme, ainsi qu'une femme d'une quarantaine d'années, attendaient patiemment. Il est descendu en m'adressant un "Merci, chef...", teinté de gratitude et de regret.
Si je vous ai raconté cette petite histoire, c'est parce qu'elle m'a marqué. Pas tant pour les quelques euros qu'elle m'a coûté, mais plutôt du point de vue du comportement d'aide en général et de ses imbrications avec la pauvreté, avec l'inconnu, avec la confiance que les Hommes peuvent s'accorder les uns aux autres.
Comment, vous, auriez-vous réagi? Quel est votre regard sur cette anecdote et sur ce qu'elle implique, dans le concret et/ou au travers d'une pensée philosophique, idéologique ou sociétale? Votre avis m'intéresse!
Sur ce, je vais me diriger tout droit vers mon lit et profiter d'un repos bien mérité. En espérant avoir suscité votre intérêt au travers de ces quelques lignes, je vous encourage à vous inscrire au blog afin de recevoir toutes les informations liées aux nouvelles publications.
A bientôt!
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